lundi 20 avril 2009

Expédition à -20

Lors de la dernière chronique, nous avons vu que le capitaine Bernier mettait en branle trois expéditions en traîneaux. Cette semaine, grâce au rapport de O. J. Morin, responsable d’une des expéditions nous suivrons quotidiennement un de ces groupes.


20 avril.Température: 20 degrés au-dessous de zéro; vitesse du vent, 5 à 6 milles à l'heure. Nous avons, aujourd'hui, marché longtemps avec la plus grande difficulté, n'avançant que de 5 milles. Etant partis du campement à 1.30 du matin, nous ne nous sommes arrêtés qu'à 2.30 de l'après-midi. A cause du mauvais état de la glace, nous avons été obligés de porter nos provisions par fractions, de mille en mille, ce qui nous a obligés à retourner plusieurs fois sur nos pas. La glace devant nous avait la forme de pyramides ou de pics et ar­rêtait considérablement notre marche. A midi, nous nous trouvions à 19 milles de l'île de Banks. Je profitai d'une éclaircie et de la pré­sence du soleil pour déterminer la latitude à laquelle nous nous trou­vions.


21 avril. Température: 12 degrés au-dessous de zéro; vent d'est de 12 milles à l'heure. A 7 heures du matin, nous quittons notre hutte de neige et marchons jusqu'à 3 heures de l'après-midi, pour franchir 6 milles de route. La glace étant encore très accidentée et, une tempête s’étant élevée, nous n'avons guère vu notre chemin à plus de 20 pieds autour de nous, dans toutes les directions; la neige poussée par le vent nous aveuglant, nous fûmes obligés d'établir de bonne heure notre campement pour la nuit. Nous nous portons tous bien malgré les fatigues du voyage.


22 avril. Température: 12 degrés au-dessous de zéro; vent de l'ouest de 11 à 12 milles à l'heure. Il a beaucoup neigé toute la nuit dernière, et il neigeait encore ce matin lorsque nous nous sommes remis en route. Nous nous sommes arrêtés à midi, comme la tempête22 tirait sur sa fin et que le ciel s'éclaircissait, ce qui, pour la seconde fois, nous a permis d'apercevoir l'île de Banks, dont notre campe­ment n'est plus qu'à deux milles. Au moment où nous nous arrêtons la température est de 8 degrés au-dessous de zéro.


23 avril. Température: 8 heures du matin, 12 degrés au-dessous de zéro; vent de l'ouest de 15 à 16 milles à l'heure; beau temps, ciel clair et soleil brillant. Une observation astronomique nous montre que nous nous sommes quelque peu écartés de notre route, et que nous nous trouvons en face de l'entrée de la baie que terminent d'un côté le cap Sandon et de l'autre le cap Parker. Ici, la glace est récente, unie et ne date que de l'hiver dernier. Nous avons quitté cet endroit à 9 heures du matin et voyagé jusqu'à 3 heures de l'après-midi, nous trouvant alors un peu à l'ouest du cap Parker: de nouveau en présence de glace accidentée. Nous nous arrêtons et établissons notre campe­ment pour la nuit, n'étant plus qu'à 16 milles de la pointe Russell, terme de notre expédition.

24 avril. Température: 8 heures du matin, 4 degrés; vent de l'ouest. Nous nous sommes remis en route à 7 heures du matin, sur de la glace très accidentée, et ne nous sommes arrêtés qu'à 8 milles de la pointe Russell. Comme le temps était très clair, je pris une photographie du cap Parker. A 5 heures de l'après-midi, nous nous arrêtons pour préparer notre campement. Une fois de plus, à cause du mauvais état de la glace, nous avons été obligés de transporter à dos nos provisions.

25 avril. Température: 8 heures du matin, 17 degrés; vent de l'ouest de 16 à 17 milles à l'heure. Nous nous sommes mis en route à 5.30 et ne nous sommes arrêtés qu'à 4 heures de l'après-midi, n'ayant franchi que trois milles avec les plus grandes difficultés. Nous sommes épuisés, et notre campement n'est plus qu'à 5 milles de la pointe Russell. Il est impossible de décrire l'aspect chaotique de la glace et des bancs de neige, formés par la dernière tempête et où nous nous enfonçons souvent jusqu'au cou. Néanmoins, nous sommes dans de bonnes dispositions d'esprit à l'idée que demain, très proba­blement, nous atteindrons notre but.

26 avril. Malgré une tempête qui s'est élevée, nous nous remet­tons en route à 9 heures du matin. A Il h. 30 m. nous campons, après avoir parcouru un mille et demi. Nous ne sommes plus qu'à environ 1. mille de la côte et à 4 ou 5 milles de la pointe Russell. A 3 heures de l'après-midi, le temps s'étant éclairci, nous nous dirigeons vers la pointe Russell, où je cherche le cairn érigé, en 1850, par sir Robert Lemesurier McClure. Mais, après quelques heures de recherches infructueuses, je dus abandonner l'espoir de le retrouver: ce cairn ayant probablement disparu, soit que le sable l'eût recouvert ou que le vent l'ait détruit. En tous cas, nous n'en pûmes découvrir aucun vestige sur la surface sablonneuse et graveleuse de la pointe Russell, où, en 1850, il fut apparemment difficile de trouver assez de pierres pour y construire un cairn, qui, de gravier et de sable, n'aurait pu résister à l'action des vents violents fréquents à cet endroit.

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